Félix coupa l'ordinateur de son bureau, rangea sa chaise de bureau sous ce dernier et enfila sa veste de costume. Il quitta la banque d'un pas vif, impatient à l'idée de retrouver Tommy avec qui il filait le parfait amour depuis son arrivée ici, depuis des mois entiers par le biais d'écrans interposés. Il lui envoya un message, lui demandant s'il était sorti de la faculté et lui annonçant qu'il prenait la direction de son appartement, comme prévu. Félix n'allait que très peu dans le sien, vide de meubles et encombrés par les cartons de son déménagement depuis Chicago. En chemin, Félix s'arrêta pour acheter une bouteille de vin, commander une pizza qui serait livré dans quelques heures et louer l'un des films préférés de Tommy puis il poursuivit sa route jusqu'à cet appartement où il se sentait comme chez lui car c'était là que son cœur était, auprès du brun. Il attrapa la clé, cachée sous le paillasson et ouvrit la porte. Aussitôt, le parfum de son amant l'envahit et il sourit, le cœur battant, foncièrement heureux. Il pendit sa veste de costume à un cintre, retira ses chaussures qu'il aligna dans la continuité du mur de l'entrée. Félix était maniaque, il en avait conscience. Il rebroussa proprement les manches de sa chemise et alla poser le vin dans la cuisine qu'il débouchonna avant de faire la vaisselle du matin, attendant impatiemment l'arrivée de Tommy. Lorsqu'il entendit la porte d'entrée, Félix abandonna sa tâche, une pauvre cuillère, et se dirigea vers l'entrée, d'une démarche sautillante, un large sourire sur le visage. « Tu as passé une bonne journée ? », s'enquit-il en le dévisageant d'un regard admiratif, contemplatif.

Félix était heureux que Tommy soit enfin là. Il était fier de la soirée qu'il avait organisé, à l'improviste, même si c'était aussi simple qu'une pizza, du vin et un film. Doucement, alors que le brun l'embrassait, Félix frotta son nez contre le sien, comme font les enfants. Il était plein de malice et de taquinnerie. Il oubliait sa trentaine déjà bien entamée avec l'étudiant. Il se sentait plein de vie et c'était vraiment un miracle de l'amour. « C'est normal que je la fasse, Tommy », répondit Félix. Ce n'était pas parce qu'il était chez lui qu'il ne devait rien faire. Il était ici autant de temps que le locataire, pour dire. Félix était pour le partage des tâches et quand bien même, faire le ménage et ranger le détendait. Il se laissa entraîner dans le salon, protestant comme un enfant alors qu'on lui frappait les fesses. « Oui, chef », répondit-il en tapant sa tête avec sa main comme un militaire. Assis sur le canapé, il se retourna néanmoins pour pouvoir observer Tommy et poursuivre la conversation. « On m'a tiré mon porte-feuille, ce matin », l'informa-t-il. « … mais sinon, tout allait bien. J'avais vraiment envie d'être ce soir pour te voir ». Félix était accro à Tommy. Il était sa drogue, sa folie. « Que voulais ton prof ? », s'enquit le banquier, curieusement. Ne tenant pas en place, il se leva et se faufila dans la cuisine, calant son ventre contre le dos du jeune homme. Il entoura son buste de ses bras et plaqua ses lèvres dans sa nuque. Il s'imprégna du parfum de Tommy. Félix ne regrettait pas son choix d'avoir tout quitté pour s'installer à Lonwook bien que cette ville lui fasse peur. Parce que le brun en valait le coup, il en était convaincu. Il porta ses mains à ses épaules, le massant doucement. « Je nous ai préparé une petite soirée, tranquille, tous les deux »

Félix haussa des épaules. Il ne savait pas tellement comme le vol s'était produit. Son porte-feuille était dans sa poche et l'instant d'après, dans les mains d'un gamin qui détalait à pleine vitesse. Il perçut de l'inquiétude dans la voix du jeune homme, ce qui l'attendrit aussitôt. « Juste en bas de ta rue, oui. Je ne sais pas, j'ai senti une main dans ma poche et le temps que je comprenne, le gamin était déjà en train de tourner au coin de la rue », expliqua le banquier. Il écouta attentivement Tommy lui parler de la faculté, un temps qui lui semblait bien lointain, ayant terminé ses études près de dix ans plus tôt. Il trouvait le professeur injuste avec Tommy. C'était un garçon sérieux et investi. L'architecture n'était pas un domaine d'études évident. Félix était admiratif, d'autant plus quand on voyait Lonwook, que son petit-ami ait choisi de telles études. Lorsque Tommy se retourna et lui offrit un baiser, Félix y répondit avec avidité. Il avait déjà eu des petits amis mais n'était jamais allé plus loin que quelques préliminaires. Avec lui, il se sentait prêt à passer le cap. Il le sentait au fond de lui, que c'était cet homme là qu'il lui fallait, bien loin de se douter de la réalité des faits. Félix prolongea le baiser, sa langue quémandant un droit d'accès pour provoquer la sienne en duel. Avec Tommy, il parvenait à oublier sa timidité presque maladive et ses quelques complexes. « C'est toi qui me rend génial, peut-être ? », suggéra-t-il en passant ses bras autour du cou de l'étudiant. Il se laissa aller contre lui alors qu'il l'enlaçait, se lovant contre son corps finement musclé. « J'ai commandé une pizza – bon, ok, y'a plus romantique mais il n'y a pas grand choix ici – et j'ai été loué le film dont tu me parlais, l'autre soir », annonça Félix, plutôt content du programme concocté. Il glissa ses mains dans le bas du dos de Tommy jusqu'à loger ses paumes dans ses poches arrières. Ses mains moulaient le postérieur du brun qu'il agrippa légèrement, le pressant contre lui. « La flic m'a parlé d'un gang, les sons of anarchy. Ils sont assez flippants, tu n'as jamais eu à faire avec eux ? » demanda Félix, légèrement inquiet pour la sécurité de Tommy. Il n'était jamais bon d'être homosexuel dans une ville avec un gang, il n'avait pas besoin de vivre ici ou dans une ville semblable pour le savoir. Cela ne faisait certainement pas bon ménage. De ce qu'il en savait, Tommy restait discret sur sa sexualité mais dans une ville aussi modeste que Lonwook, cela devait sans doute se savoir, non ? Peut-être était sans doute pour ce protéger, les protéger, que Tommy ne sortait jamais avec lui.

« Ce n'est pas la peine de déranger ta sœur pour ça. La flic qui s'est occupée de moi m'a rassuré. Il n'y a aucun liquide, que mes papiers et franchement, t'en vois beaucoup des gens ici qui peuvent usurper l'identité d'un philippin ? », répondit Félix, néanmoins attendri et touché par l'attention du jeune homme qui semblait vraiment troublé par le vol subi par Félix dans la matinée. Ce n'était rien. Félix avait lui-même eu très peur mais la policière l'avait rassuré en bonne et du forme. Leur baiser s'acheva avec frénésie. Félix était à bout de souffle, en alerte, en proie à un désir certain. Félix frotta son nez contre la joue rosée de Tommy. « Ma mère ne dirait pas un peu fou mais que je suis complètement cogné du bocal », rétorqua Félix en riant. Il est vrai qu'il avait prit une folle décision en traversant toute l'Amérique avec seulement trois cartons comme affaires. Il avait quitté un emploi stable depuis sept ans, une ville qu'il adorait, ses amis, sa famille, tout ça pour un garçon qu'il n'avait jamais vu en vrai et qu'il connaissait depuis seulement huit mois. C'était d'ailleurs pour cette folie que sa mère ne lui parlait plus – ou presque plus – et que son père terminait toujours une conversation en criant. On lui disait sans cesse qu'il avait gâché sa vie en agissant ainsi mais dans les bras de Tommy, à cet instant, il n'arrivait pas à leur donner raison. Félix se sentit soulagé lorsque Tommy lui assura qu'il menait une petite vie tranquille. C'était tant mieux. Alors que Tommy commençait à tirer sur les pans de sa chemise, Félix blagua en répondant simplement : « Moi ! ». Il rit doucement. « Eh, tu m'as dit, dis-moi, je réponds moi, me regarde pas comme ça », s'esclaffa-t-il alors qu'un frisson le parcourait en sentant les mains de Tommy sur sa peau, sur son ventre. Il se mordit la lèvre tout en souriant. Il continua de rire alors que Tommy se renseignait sur l'heure de la livraison. Il fondit totalement face au regard adressé par le brun. Il était coquin et cela l'excitait, le stimulait, il ne pouvait pas prétendre le contraire. Cela faisait trois semaines qu'il partageait réellement sa vie et Félix se sentait prêt. Une confirmation lui vint alors que le souffle de Tommy se faisait sentir dans son cou. Il gémit, un peu malgré lui, rougissant de cette réaction de son corps et de son esprit. « Neuf heures, on a le temps », répondit-il dans un souffle, incapable de penser à autre chose qu'aux mains du jeune homme sur son ventre et son souffle, fouettant son cou. « Tu pensais à quelque chose en particulier ? », demanda-t-il d'un air innocent.

Tout quitter pour Tommy n'était pas une folie, à son goût. C'était au contraire, une raison. C'était être raisonnable de se rapprocher de l'homme qui contribuait à son bonheur et il ne regrettait pas son choix pour le moins du monde. « J'ai tout quitté pour toi parce que tu en vaux la peine, Tommy », répliqua Félix. Il fut rassuré de voir que Tommy partageait sa malice et sa coquinerie. Cela ne fit qu'attiser son désir à l'égard du brun à la peau légèrement halée alors qu'il déboutonnait sa chemise. Félix regardait attentivement ses doigts s'affairer et il réprima un nouveau frisson ainsi qu'un soupir de bien être lorsqu'il caressa son torse. Il fixa la main de Tommy sur la ceinture de son pantalon à pinces, serrant la mâchoire. Il avait envie de Tommy, c'était clair, précis, définitif. « J'en connais tout un tas », répondit-il. En effet, Félix avait déjà eu quelques petits amis avec qui il avait fait, ses petits jeux intéressants. Au moins, ce soir, ils étaient sur la même longueur d'ondes concernant leur intimité. Peut-être n'allait-il pas aller jusqu'au bout mais au moins, il était presque certain qu'ils franchiraient un nouveau cap. Félix agrippa l'ourlet du chandail de Tommy et lui retira, découvrant ce torse dont il ne pouvait plus se passer. Il vint l'embrasser et fit glisser ses lèvres sur sa mâchoire, dans son cou, sur ses épaules puis finalement, sur son torse où ses lèvres vinrent prendre son mamelon. Il fit glisser ses mains jusqu'à l'ouverture du pantalon de Tommy. Félix hésita un instant avant de souffler pour se donner du courage et de faire sauter le bouton, de descendre la fermeture. Il passa sa main sur ses hanches puis sur son postérieur, par dessus son caleçon, écartant ainsi les pans de son jean. Doucement, Félix remonta ses lèvres aux siennes, collant son buste contre le sien et attrapa sa main pour l'entraîner sur le canapé sur lequel il poussa Tommy. « J'ai très envie de toi », souffla Félix alors que le rouge lui venait aux joues.

Félix n'était pas quelqu'un de très audacieux, en temps normal. Il préférait se laisser faire, il était davantage passif qu'actif dans ce genre de situation, sans aller jusqu'aux choses sérieuses. Instaurer une atmosphère de jeu était une manière pour Félix d'oublier sa timidité et sa gêne. Il s'installa à califourchon sur Tommy qui lui intimait de s'approcher et frotta instinctivement son bassin contre le sien. Félix porta son regard sur le boxer moulant de Tommy et opina du chef de bas en haut. « Oh si, je commence à me faire une petite idée... », souffla-t-il en passant le plat de sa main sur le torse bronzé de Tommy. « Pas si petite que ça, d'ailleurs » poursuivit le banquier en levant son regard parce qu'il trouvait cela malsain, à terme, de fixer l'érection naissante de Tommy. Félix gémit alors que Tommy laissait sans doute une jolie marque violacée dans son cou, qu'il faudrait cacher avec le col de sa chemise ou même une écharpe. Continuant à frotter son bassin contre le sien, il fût flatté d'entendre la respiration haletante de son amant. « Ce sont des jeux de grands, tu sais ? », s'amusa Félix, à propos de leur différence d'âge qui frôlait les dix années. De nouveau, sa main glissa plus au sud pour franchir l'élastique de son dessous et venir effleurer sa virilité. La prenant en main, il ne put s'empêcher d'ajouter, en riant : « … mais c'est grand alors je peux t'expliquer les règles ». Il vint l'embrasser, mordillant sa lèvre inférieure au passage. Félix glissa hors du canapé pour venir s'agenouiller devant celui-ci et abaissa son caleçon. « La première c'est de prendre du plaisir », annonça-t-il en déposant un baiser léger sur son sexe. « La seconde c'est … bah en fait, j'en sais rien, tu vas devoir la trouver tout seul ». Sur ces mots, il commença une douce et humide masturbation. Il n'avait pas fait cela depuis des mois, presque deux ans et craignait que Tommy n'apprécie pas, ne le trouve pas '' doué ''. Après tout, avec un physique avantageux, il avait du en connaître, des amants.

Félix sentait le regard de Tommy sur lui mais au lieu de l'intimider, cela le mit en confiance. Il continua à faire glisser ses lèvres sur le sexe de son petit-ami, content que leur relation prenne ce nouveau tournant. C'était une évolution entre eux, certaine et indéniable. Félix avait eu quelques amants mais cela n'avait jamais été aussi intense. Jamais faire une fellation à un homme ne lui était apparu comme une façon de se rapprocher encore plus, comme c'était le cas avec l'étudiant en architecture. Il ferma les yeux, se délectant des doigts de Tommy dans ses mèches brunes et courtes puis de sa main sur sa nuque qui lui dictait un certain rythme. Félix rigola tout contre lui avant d'enfin remonter doucement à ses lèvres, picorant sa peau, y déposant des baisers ponctuels et brefs. Il revint s'installer sur ses jambes et vint l'embrasser avec une certaine fougue, glissant sa main sur la chaleur du jeune homme. « Précoce, le grand Tommy DeMarco ? » lança Félix sur un ton malicieux et taquin. Il recula pour pouvoir admirer le visage rougi de Tommy. Il était beau. Il était son plus beau rêve, ce qu'il avait toujours convoité et maintenant, il était à lui. A ce stade, allaient-ils franchir le cap ? Félix l'ignorait. Pourtant, au creux de son ventre, il sentait une angoisse naître. Il n'avait jamais fais l'amour à un homme. Il avait trente-cinq ans et pour un homosexuel affirmé depuis quinze ans, cela lui semblait honteux. Cachant son visage dans le cou du natif de Lonwook, Félix y mordilla sa peau. « Tommy, je dois t'avouer quelque chose », souffla Tommy, toujours blotti dans le cou de son amant. « On a jamais eu l'occasion d'en parler mais ... ». Félix craignait que ce critère ne repousse le jeune homme. Il s'attendait à ce qu'il ait eu de nombreux amants avant lui. « … je n'ai jamais fais l'amour avec un autre homme ». Et les rares fois où il avait couché avec des femmes, Félix avait détesté cela.